Sékou Camara est un intellectuel accompli et fécond en matière de l’écriture. Au-delà de son militantisme au service du président Alpha Condé, il fait partie de cette fine fleur qui prend de la distance du soutien dans la passion. Il conseille souvent tant bien que mal son propre camp afin de bien peaufiner la gouvernance. Ici, Sékou Camara règle des comptes à l’écrivain Tierno Monénembo, et ce n’est pas la première fois, à chaque fois que le littéraire critique la gouvernance Alpha Condé sous un angle personnel, l’ex-directeur de l’Office guinéen des chargeurs répond. Lisez ci-dessous sa tribune !
Notre célébrissime écrivain, Tierno Monénembo dans sa tribune : »La bassesse humaine a eu raison de la belle et grande Guinée » publiée le 17 juillet 2021 dans certains médias guinéens en ligne comme à son habitude soutien « l’idée que quand le président est mauvais, tout est mauvais » et qualifie notre économie d’être en ruine et la société en lambeaux.
Pour qu’une économie soit en ruine, il aurait fallu qu’elle soit édifiée. Qui sont les auteurs de cette économie qui est tombée en ruine ? Les moments glorieux du vivre ensemble étaient sous le régime du PDG. Durant toute cette période, tout guinéen pouvait se faire élire dans n’importe quelle région du pays. Une société en lambeaux est-elle capable du sursaut nationaliste qu’à fait le peuple de Guinée en septembre 1958 ?
Une société en lambeaux est celle qui s’entredéchire ou qui a connu une calamité. La société guinéenne est-elle dans une de ces positions ?
Il y a du non-dit dans le texte de notre romancier. Il n’a qu’à être plus explicite en assumant ses idées et les énoncées clairement.
Il est très difficile pour un romancier de devenir historien. Le roman est une œuvre d’imagination constituée par un récit et l’histoire est la narration des faits.
Monénembo est en train d’imaginer notre histoire et cela crée de la confusion. Selon lui,
« Guider un peuple, cela revient à l’élever à un certain niveau intellectuel et moral ».
Pourtant à l’indépendance du pays en 1958, la Guinée comptait peu d’intellectuels encore moins d’universitaires. Le PDG à travers sa politique d’enseignement de masse a démocratisé le savoir en permettant aux enfants de paysans dont lui de fréquentes l’école qui était réservée aux enfants des chefs de cantons et aux privilégiés.
Les présidents successifs ont maintenu le cap pour permettre au pays d’avoir des cadres dans tous les domaines. Au cours d’un voyage en Guinée en 1983, Dr Alphonse Djédjé Mady, Secrétaire Général du bureau national de la jeunesse du PDCI avant de devenir ministre de la santé de la Côte d’Ivoire disait : »La Guinée est le seul pays dans la sous-région qui se suffit en profondeur de sciences (mathématiques, physique, chimie et biologie) ».
Sous le PDG, les habitudes de villes propres étaient la règle et l’exemple venait d’en haut.
Le fonds qui a servi à la construction de la mosquée Faycal de Conakry, 4ème mondiale dans son type est un don personnel au Camarade Ahmed Sekou TOURE par le roi Faycal d’Arabie Saoudite.
La résidence de notre ambassadeur à Rabat au Maroc est un don du roi Hassan II aux enfants du président Ahmed Sekou TOURE. Tous les enfants du premier président ont effectué tous leurs cycles scolaires et universitaires en Guinée dans les mêmes salles de classe que les autres enfants guinéens.
Il remplacera sa fille Aminata, légalement admise à une bourse d’études à l’extérieur après le baccalauréat par le fils de la présidente du bureau régional des femmes de Labé. Le détournement de derniers publics est sévèrement sanctionné. Le président Alpha Condé a mis sa famille y compris son fils, pourtant méritant hors de la gestion du pays.
Quel niveau moral voudrait Tierno Monénembo que nos dirigeants mènent le peuple ?
Dans un pays basé sur le tribalisme où les gens sont acceptés ou rejetés pour ce qu’ils sont et non pour ce qu’ils font, les seuls présidents peuvent-ils être les causes des maux dont souffre un tel pays ?
Notre grand romancier qualifie nos dirigeants de manquer cruellement de discernement, capables de former des régimes médiocres qui abrutissent et pervertissent leurs peuples en s’appuyant du Machiavel qui disait « Gouverner, c’est mettre vos sujets hors d’état de vous nuire et même d’y penser ». Il y a-t-il un gouvernement dans le monde qui met son peuple dans un état de le nuire ? La passion n’a jamais fait bon ménage avec une réflexion fondée.
Tierno Monénembo donne une place privilégiée à l’intellectuel dans la vie d’une nation. Si cela est normal et juste, il y a lieu de se demander qui est intellectuel ? Est-ce celui qui est auréolé de diplômes ou celui qui réfléchit de façon rationnelle sur les problèmes de son temps ?
Rabelais ne disait-il pas que « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » ?
Mieux, notre intellectuel doit savoir que la compétence se situe sur deux axes :
– sur l’axe du savoir-faire, donc de l’exécution, la compétence d’un cadre est proportionnelle à sa connaissance dans le domaine ;
– sur l’axe du savoir-faire-faire, donc de direction, la compétence en plus de la connaissance pure, inclue surtout l’aptitude et l’attitude.
On peut tout reprocher au Camarade Ahmed Sekou TOURE malgré qu’il a été renvoyé de l’école à cause de ses prises positions contre le blanc avant les examens d’entrée en 7ème année qu’il n’avait pas la connaissance, aptitude et l’attitude nécessaires pour diriger un pays.
Le PDG avait le meilleur projet de société, ces instituteurs et médecins de brousse ont créé l’Etat guinéen après que la France colonisatrice ait tout détruit.
Le Brésil a un moment de son histoire avait formé le gouvernement le plus intellectuel ou tous les ministres universitaires excellaient dans son domaine sans que le succès ne soit au rendez-vous.
Diplômé pour diplôme, donc intellectuel pour intellectuel, aucun dirigeant occidental n’allait diriger ; car ils ne sont pas académiciens encore moins savant. En citant souvent Aimé CÉSAR et Cheick Anta DIOP, notre distingué écrivain confond le lettré et l’intellectuel sinon les chasseurs de koufoukanfouga illettrés en français et en arabe mais intellectuels n’allaient pas réussir en 1236 à former une organisation étatique jamais égale et dotée de l’empire (Etat fédéral) de la première construction du monde admise aujourd’hui comme la première déclaration universelle des droits de l’homme.
Il accuse nos dirigeants d’avoir coupé un à un les liens multiséculaires qui unissaient nos familles, ethnies et régions. Pourtant, les quartiers Nassoufoulaye, hamdalaye, foulamadine etc. existent à Conakry en base côté. Il y a plus de 40 villages malinke qui existent toujours au fouta et partagent leurs quotidiens comme à l’accoutumer avec les voisins. Les mariages mixtes entre les ethnies se scellent de la plus belle manière.
Nous célébrons nos peines et nos joies ensemble comme de par le passé.
Quels liens séculaires sont rompus ? Par qui et quand ?
Notre lauréat du prix Renaudot affirme que la Guinée est devenue un pays de « n’importe qui et du n’importe quoi ? Tout le monde est égal. Tout le monde a le même âge, le même rang social, la même valeur intellectuelle et humaine. Aucune ségrégation basée sur le mérite.
Cependant, si notre société a atteint un tel niveau de confiture, il n’y a aucun décret qui institut cet état de fait.
En Guinée comme partout ailleurs, les environnements politique et administratif ne tiennent pas nécessairement compte de la valeur académique. Dans les universités, les PDG dans sa stratégie de lutte pour l’indépendance du pays a aboli la chefferie traditionnelle qui était une méthode d’asservissement de l’homme par l’homme.
Si notre notable du fouta n’a pas aimé cette démarche, il aurait fallu être là pour mettre fin à la domination étrangère et favoriser celle locale. Dans l’incapacité de reconnaître les mérites de nos dirigeants, Tierno Monénembo ramène la fierté, donc la grandeur de notre nation aux temps de Samory Touré, Alpha Yaya Diallo, Dîna Salifou et Zegbela Togba.
Sans mettre en cause l’œuvre de nos héros qui nous ont montré le chemin de l’honneur et de la dignité, un esclave peut-il être plus fier et grand plus qu’un homme libre ?
La grande et la fierté de la Guinée ont véritablement commencé par son « Non » historique à la domination française lors du référendum du 28 septembre 1958, son admission à l’ONU contre la volonté de la France, la proposition et l’acceptation de l’article 1314 de la charte de L’ONU qui stipule la liberté détermination des peuples à accéder à l’indépendance et son soutien multiforme et multidimensionnel à tous les mouvements de libération en Afrique.
Ces distinctions qui ont fait et font toujours la grandeur de notre pays ont été acquises sous la clairvoyance du camarade Ahmed Sekou TOURE.
Peut-on nier le travail titanesque des compagnons de l’indépendance qui a permis à la Guinée d’être la seule ancienne colonie indépendante et libre parce qu’ils ne sont pas universitaires ?
Peut balayer d’un revers de la main l’œuvre de préservation de l’intégralité de notre territoire des attaques rebelles de 2000 et de démocratisation du pays par le Gl Lansana CONTE parce qu’il n’est pas polytechnicien ?
Peut-on passer sous silence les travaux gigantesques du Pr Alpha Condé dans les secteurs de l’électricité, des mines, de l’hôtellerie, routier, agricole, la réforme des forces de défense et de sécurité, institutionnelle, le retour de la Guinée sur la scène internationale etc., parce qu’on aime l’homme pour ce qu’il est et non ce qu’il fait ?
Certains intellectuels guinéens en perte de repères au lieu d’apporter les solutions aux problèmes du pays, instrumentalisent leurs ethnies en faisant sciemment l’amalgame pour assimiler l’ethnie du président à son pouvoir.
Pourtant, dans les instances de décisions de tous les régimes guinéens se retrouvent les membres de toutes les ethnies. Toutes les ethnies ont subi la rigueur de la loi de tous les régimes.
Il n’est même pas exagéré de dire le règne de tous les présidents guinéens a été plus profitable à d’autres ethnies que sa propre ethnie.
Le président Ahmed Sekou TOURE n’a par exemple jamais nommé un premier ministre malinke. De même que les présidents Lansana CONTE et Alpha Condé n’ont jamais eu de premier ministre de leur ethnie.
Même ces deux derniers n’ont aucune obligation. Dans système de multipartisme, c’est le militant qui compte et non le dosage ethnique.
Le problème fondamental de la Guinée est notre incapacité à nous élever au-dessus des événements surtout malheureux et faire face à notre destin commun.
C’est la recherche de cet élévateur qui doit être le travail des intellectuels que de continuer à retourner le couteau dans une plaie où les auteurs à tort ou à raison ne sont presque plus de monde.
Est-il normal de punir ou méprisé un enfant pour les actes de ses parents ou toute une ethnie pour les faits d’un régime dirigé simplement par un président issu d’elle ?
Par Sékou Camara